Temps d’écran et développement des jeunes enfants

Dans cet article, nous vous proposons d’étudier les impacts du temps d’écran sur le développement des jeunes enfants de 0 à 3 ans.

L’essor des technologies numériques a transformé la vie quotidienne des enfants dès leur plus jeune âge. Depuis l’arrivée des smartphones et des tablettes, l’accès aux écrans s’est généralisé, soulevant des interrogations sur leurs effets sur le développement des tout-petits. Dans de précédents articles, nous avons déjà étudié les moyens de lutter contre la surexposition des plus jeunes aux écrans, l’effet d’internet sur le cerveau des adolescents ou encore l’influence du stress parental sur leur temps d’écran.

Aujourd’hui, nous vous présentons une revue systématique de 158 études publiées entre 2007 (sortie du 1er Iphone) et 2024 qui a analysé l’impact du temps d’écran sur les enfants de 0 à 36 mois. Cette synthèse met en lumière les principaux résultats et propose des recommandations pour un usage raisonné des écrans en bas âge.

On fait le point.

temps écran développement enfant

L’enfance est une période de développement rapide, où les expériences jouent un rôle clé dans l’acquisition des compétences cognitives, motrices, sociales et émotionnelles. Les experts s’accordent sur le fait que la surexposition aux écrans peut présenter des risques pour les jeunes enfants, notamment parce que les écrans se substituent à des activités essentielles comme les interactions sociales, le jeu actif et le sommeil. Mais l’impact des écrans dépend de nombreux facteurs comme le contenu regardé, le contexte d’utilisation et les caractéristiques individuelles de l’enfant.

Comment le temps d’écran influence-t-il le développement global des enfants de 0 à 36 mois ? Quels sont les effets du contenu et du contexte d’exposition sur ces influences ?  Quelles recommandations peut-on en tirer pour les familles et les professionnels de la petite enfance ?

Pour répondre à ces questions, les chercheurs ont donc sélectionné et analysé 158 études publiées entre 2007 et 2024. Ces études incluaient des approches expérimentales, longitudinales et transversales. L’analyse s’est concentrée sur neuf dimensions du développement :  le sommeil, la santé physique, les capacités cognitives, l’efficacité d’apprentissage, le langage, les compétences motrices, le développement socio-émotionnel, les interactions sociales et le développement global.

Les résultats ont ensuite été analysés selon le type de média (TV, tablettes, smartphones, jeux vidéo), le type de contenu (éducatif, distractif, violent) et le contexte d’usage (co-visionnage avec un adulte ou usage solitaire).

1. Temps d’Écran et Sommeil

Le sommeil est crucial pour le développement du cerveau en bas âge. Une majorité d’études ont trouvé des associations négatives entre le temps d’écran et la qualité du sommeil (c’est-à-dire que plus le temps d’écran augmente, moins le sommeil est de bonne qualité):

– Coucher retardé : Les enfants exposés aux écrans, notamment avant le coucher, s’endorment plus tard. 

– Réduction de la durée du sommeil : Une augmentation du temps d’écran est corrélée à une diminution du temps total de sommeil. 

– Réveils nocturnes plus fréquents : Certaines études ont trouvé que le temps d’écran était lié à des interruptions du sommeil. 

Les effets semblent être amplifiés lorsque l’enfant regarde seul des écrans ou lorsqu’il est exposé à des contenus très stimulants (bruit, lumières vives).

Il est donc recommandé d’éviter les écrans au moins une heure avant le coucher pour préserver un sommeil de qualité.

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2. Impact sur la Santé Physique

L’usage des écrans peut avoir des répercussions sur la santé physique des enfants, principalement en raison de la sédentarité qu’ils encouragent. Plusieurs études ont trouvé des associations entre un temps d’écran excessif et un risque accru d’obésité chez les jeunes enfants :

– Alimentation déséquilibrée : Les enfants qui regardent beaucoup la télévision consomment davantage d’aliments transformés et sucrés. 

– Diminution de l’activité physique : Plus un enfant passe de temps devant un écran, moins il pratique d’activités motrices essentielles à son développement et à sa bonne santé. 

Cependant, quelques études expérimentales ont aussi montré que certaines formes de co-visionnage pouvaient avoir des effets positifs, notamment sur la régulation du stress (ex. effets apaisants des visioconférences avec des proches).

Les auteurs conseillent donc de favoriser les activités physiques (si possible en extérieur) et de proscrire les écrans pendant les repas.

3. Effets sur le Développement Cognitif

Les résultats concernant l’impact des écrans sur les capacités cognitives sont contrastés. Les auteurs ont ainsi constaté des effets négatifs (un temps d’écran excessif, surtout lorsqu’il est passif – TV, vidéos non interactives – est associé à un ralentissement du développement du langage et à des difficultés de concentration) et des effets positifs (certains contenus éducatifs, visionnés dans un cadre interactif avec un adulte, peuvent stimuler l’apprentissage de nouveaux mots et concepts). 

Cependant, à propos de ces aspects positifs, l’hypothèse du « déficit vidéo » (Barr, 2008) postule que les jeunes enfants apprennent mieux au cours d’interactions en face-à-face que par l’intermédiaire d’un écran, notamment en raison de signaux socialement pertinents présents lors des interactions sociales réelles, tels que les indices visuels, auditifs et spatiaux. Ceux-ci facilitent l’intégration des informations.

Il est donc recommandé de privilégier les contenus éducatifs interactifs et limiter l’exposition passive aux écrans.

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4. Développement Socio-Émotionnel et Interactions Sociales

Les études montrent que le temps d’écran peut influencer les interactions sociales et la régulation des émotions de façon positive ou négative. Ainsi, un usage excessif des écrans peut diminuer la fréquence et la qualité des interactions sociales avec les parents et les autres enfants.  Mais lorsque les écrans sont utilisés de manière interactive (visioconférences, jeux éducatifs partagés), ils peuvent favoriser des interactions sociales de qualité. 

Un point clé est le rôle des parents. Lorsque l’enfant est accompagné dans son usage des écrans, les effets négatifs sont atténués.

Il convient donc d’encourager les échanges en face-à-face et d’éviter l’usage solitaire des écrans.

Facteurs Clés à Prendre en Compte

L’étude met en évidence que l’impact du temps d’écran ne dépend pas uniquement de la durée, mais aussi de plusieurs facteurs :

– Le type de contenu : Un contenu éducatif et interactif est plus bénéfique qu’un contenu passif. 

– Le contexte d’utilisation : Un co-visionnage avec un adulte favorise l’apprentissage et limite les effets négatifs. 

– Les caractéristiques individuelles de l’enfant : Certains enfants sont plus sensibles aux effets des écrans que d’autres. 

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Les résultats de cette revue confirment que le temps d’écran peut avoir des effets négatifs sur le développement des jeunes enfants, notamment sur le sommeil, la santé physique et les interactions sociales. Cependant, ces effets ne sont pas inévitables : tout dépend de la façon dont les écrans sont utilisés.

D’une manière générale, on peut retenir qu’il est important de limiter le temps d’écran (surtout chez les enfants de moins de 3 ans qui ne doivent pas être exposés aux écrans), d’éviter les écrans avant le coucher pour préserver le sommeil, de privilégier les contenus éducatifs et les interactions actives, et enfin d’encourager les interactions sociales réelles (les réseaux sociaux n’ont aucun intérêt pour les enfants. 

Les écrans en eux-mêmes ne sont donc pas un danger. Le problème est davantage la façon dont on les utilise. Il est essentiel de les intégrer intelligemment dans l’environnement des jeunes enfants. Une utilisation modérée et encadrée peut en limiter les risques et en maximiser les bénéfices. Mais les parents doivent comprendre que pour que les écrans puissent avoir un impact positif sur leur enfant, il convient les accompagner dans leur découverte du numérique, et que cela peut demander beaucoup de temps.